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La Cause des Filets


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Edition : François Morel

Comment devient-on un homme ou une femmme?
AMBIGUÏTES SEXUELLES, par Geneviève Morel

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L'organe-cartel

François Morel

Lacan crée un mythe pour dire le retour au réel de la libido : le mythe de la lamelle. Ce mythe vient à la place de celui d'Aristophane ; le sujet n'y perd pas sa moitié sexuée, mais une lamelle amiboïde; non d'avoir défié les dieux, mais pour être né au champ de l'Autre; le mythe n'est plus de l'Un, mais de l'Autre. Dans ce texte, Lacan appelle «organe», ou plutôt «faux organe» de la libido, ce qui vient en position d'équivalent de la libido perdue, et symbolise toutes les formes énumérables de l'objet (a ).

Or, Lacan désigne le cartel du même terme : «organe». Cet emploi est-il de hasard? Certainement pas : le terme est utilisé en 1964, année de la fondation de l'EFP et de l'invention du cartel, année aussi où Lacan crée son mythe; le même terme est encore repris en 1980.

Mon hypothèse est donc celle-ci : le terme «organe» est transposé de la logique subjective à la théorie du groupe; pour le groupe comme pour le sujet, il renvoie à la part de libido perdue; le cartel est ainsi l'instrument propre à condenser la "lamelle perdue" du groupe analytique; il est en quelque sorte son petit (a); il permet au sujet d'y soutenir une autre relation qu'identificatoire à ce qui opère dans l'inconscient.

L'OBJET CHU DU GROUPE

A considérer l'histoire à partir de cette hypothèse, on s'aperçoit que le cartel a toujours été un objet chu au moment de la séparation du groupe, qu'il est effet dans le groupe de l'introduction du discours analytique. Notons :

1) L'invention du cartel est consécutive à "l'excommunication" de Lacan; c'est dans l'acte de séparation que naît le cartel, «organe de base».

2) C'est au moment où se dissout l'EFP que le cartel renaît en s'affinant.

3) Et c'est également au moment où l'AMP est masse pesante de ses cinq Écoles, que renaît logiquement une interrogation d'École sur le cartel.

Jacques-Alain Miller remarque le poids de la tradition du cours magistral dans les écoles sud-américaines, l'appétence du groupe analytique pour le leader charismatique, le manque d'enthousiasme pour le cartel. Soulignons ici le constat de la tendance spontanée de l'association à se faire groupe , retour du Même . Le "Spectre du Même" justifie l'élaboration actuelle. Mais nécessité n'y suffit : il faut se donner des moyens articulables dans la structure.

MASSE ET CARTEL

Le désinvestissement du cartel, quand il se produit, est corrélatif de la massification du groupe. Le cartel est désinvesti quand il échoue dans sa fonction dissolutoire, tourbillonnaire. Diagnostic : maladie du cartel? Non, plutôt "maladie normale de groupe". Diminuer le nombre de cartels déséquilibre alors au profit du groupe.

Dans sa tendance spontanée -Massenpsychologie -, le collectif, fut-il analytique, est rétif à l'inconscient. Il "organise" sa cause sur le mode des foules, c'est-à-dire dans un rapport amoureux au chef ou à une valeur idéale qui se substitue à l'objet perdu, ce qui équivaut à l'hypnose. Le rapport libidinal à l'objet perdu (a), soit ce qui du réel revient, est là masqué, aimablement vu habillé d'un imaginaire i(a), moi-idéal soutenu par l'idéal du moi I(A) . En somme, le groupe psychanalytique "organisé" s'oppose à la praxis analytique, si celle-ci est censée dissiper les vapeurs de la suggestion pour démontrer le réel.

Choix forcé alors : dissolution du groupe ou dissolution de l'inconscient?

La problématique de la libido transposée du sujet à l'association saisit le ressort du cartel : l'extension de la psychanalyse, c'est la question de l'inconscient au collectif. Or, l'association, par effet de groupe (= par structure), métaphorise la cause inconsciente dans sa relation au leader ou à l'idéal. D'où l'intérêt de définir des structures "à côté", métonymiques au groupe, d'où se détermine un "plus-d'aptitude" à élaborer l'inconscient.

Comme le désir de l'analyste en position de semblant, c'est-à-dire d'objet (a), secoue l'analysant de sa torpeur identificatoire, il faut que le cartel par effet de retour joue dans l'institution son rôle de faux-organe en introduisant un tourbillon dans ce qui autrement se sédimente, se fossilise, se dessèche avant de se fragmenter, tout çela très vite, témoin l'histoire des sociétés analytiques.

Dans "D'écolage" Lacan équivoque sur "colle" et "école", emploie les métaphores de la dissolution et de l'intoxication par la colle pour ce qui est de l'EFP. "L'Association contamine l'École", avons-nous lu à propos d'un exemple précis, récent.

SUR L'ACTUELLE RÉFORME DES CARTELS (au sein de l'École de la Cause freudienne)

À partir de ces considérations, on voit en quoi la récente création des cartels d'adresse et de liaison est excellente : elle augmente la surface de la "zone érogène du groupe", propre à ce que son activité pulsionnelle fasse le tour des cartels (a).

Inversement, est-il judicieux de ponctionner son "réservoir de libido" par la diminution "un-posée" du nombres des cartels? La répétition du "Un" (un cartel, un an, investissement du plus-un) n'est-elle pas symptomatique? N'est-ce pas trop centralisateur? De plus, la structure ainsi créée ne pèche-t-elle pas par un excès d'arborescence? Du fait de l'unicité du cartel, les liens d'élaboration à la base ne risquent-ils pas de se relâcher?

Est-il ennuyeux que les CAL ne traitent pas tout? En diminuant le nombre des cartels, le problème n'est pas résolu. Un exemple : cette année, les deux tiers de mon travail n'ont pu s'inscrire en cartel; une part a été déclarée à la mode EFP : Séminaire-groupe sur la pratique clinique; l'autre, non : l'enseignement de l'Antenne clinique Aix-Marseille n'a pu s'élaborer en cartel. C'est un effet direct de la réforme. Le travail se fait tout de même, mais en dehors de la structure cartel, et n'intéressera donc pas les CAL. Cet effet a-t-il été perçu?

LA FONCTION DU PLUS-UN

La construction logique du cartel autour d'un plus-un fait qu'il n'y a pas au départ un trait faisant assurément cause commune : le plus-un est d'abord formel avant d'être quelqu'un. Comme le cartel n'offre pas d'emblée d'identification pacifiante, chaque sujet est poussé au travail d'avoir à combler par des trouvailles cette absence .

Suite au débat récent sur la fonction du Plus-un : le resserrement de son lien au groupe favorise-t-il les connexions et l'effet de refente attendus? Un plus-un linguiste, peintre, mathématicien, philosophe, etc, va-t-il s'impliquer dans le fonctionnement institutionnel de l'École? Qu'il fasse la déclaration de cartels est déjà beaucoup. Cela ne va-t-il pas conduire à orienter le choix du plus-un dans un sens plus "académique"?

CONCLUSION

L'institution a une tendance spontanée à mettre le cartel sur la touche : c'est normal, c'est logique. Pour témoins de ce rôle de (a), noyau d'élaboration valorisée certes, mais aussi de déchet, notons la tendance démontrée par l'EFP à refouler, minimiser leur place et leurs produits. L'ECF, en tant que contre-expérience doit soutenir autrement sa cause cartel.

La fonction du cartel dans son rapport à l'association doit s'examiner dans le même rapport logique que celui que l'objet (a) entretient avec le symbolique, et dans les mêmes rapports que les opérations d'aliénation et séparation de l'inconscient. Il peut faire alors contrepoids à la charge libidinale de l'institution qui "assomme" ses sujets sous le poids des identifications. Phénomène inscrit, rappel exprès, dans un fait de structure de groupe seulement .

Pour ce, il est préférable que le cartel continue à s'inscrire dans un lien métonymique à l'institution, dans un de ses "à côté"; son influence doit rester discrète . Il doit garder quelque chose d'hétéroclite dans son rapport à l'association. Disons qu'il devrait pouvoir "ex-communiquer" avec elle pour "d'écoler l'École" et non pas "coller l'acole".

Le cartel est plus propice à l'élaboration que le groupe. Le rien constituant du cartel est l'agent nécessaire à élaborer quelque chose du discours analytique (a -->$). Il peut préserver l'énonciation de chacun "dans ce qu'elle a de hasardeux, de singulier, et aussi de déplacé" . Dans le groupe, ce "rien" s'efface, on l'a vu, on le voit.

BIBLIOGRAPHIE :

J. Lacan: Le Séminaire, livre XI, ch. XV, p 171-182, Seuil.

PLATON : Le Banquet, in OEuvres complètes,p. 715-722, La Pléiade.

J. Lacan, "D'écolage", 11/3/80, Ornicar 20-21, p.15: "... je démarre la Cause Freudienne- et restaure en leur faveur l'organe de base repris de la fondation de l'Ecole...le cartel, dont, expérience faite, j'affine la formalisation...."

J.-A. Miller, "Le cartel dans le monde", La Lettre mensuelle, 134, Déc. 94, p. 3-5.

J. Lacan, L'Étourdit, Scilicet, Seuil.

J.-A. Miller, "L'oubli de l'interprétation", La Lettre mensuelle, 144, Déc. 95, p. 1-2. Ces 2 textes de la Lettre 134 et 144 sont ici mis en rapport.

COCCOZ V. : Actualité espagnole : le cartel, l'Ecole, La Lettre mensuelle, 93, nov. 90.

cf note 6.

cf la chaîne du produit : cartellisant -> plus-un ->cartellisant du CAL -> plus-un du CAL -> instance de l'École -> retour . D'autre part, à la base, si chacun ne travaille que dans un cartel, par absence d'intersection des cartels d'où isolement, il n'y a pas de propagation latérale des signifiants du travail de cartel à cartel, la médiation du travail se faisant forcément par réunions officielles.

COCCOZ V. : Actualité espagnole : le cartel, l'Ecole, La Lettre mensuelle, 93, nov 90.

"Qu'attendre du plus-un" , La Lettre mensuelle, 144, Déc. 95.

L'obscénité imaginaire, effet réel du groupe, renvoie le non-symbolisé au corps et transfère un défaut structural en "problèmes de personnes".

J. Lacan, Séminaire XI, Chapitre 1, Seuil.

Ce travail a été élaboré et soutenu en cartel, dont le plus récent comprend : Ghislaine Delahaye, Marie-Pierre Girard, Muriel Mosconi et comme plus-un André Astier (mathématicien et membre de l'ACF Aix-Marseille).

cf note 6.

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